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Edouard 1er l'ancien

Édouard l'Ancien est roi des Anglo-Saxons de 899 à sa mort, le 17 juillet 924.

À la mort de son père Alfred le Grand, en 899, Édouard est confronté à la révolte de son cousin Æthelwold, qui revendique le trône. Sa mort rapide, en 902, laisse Édouard libre de poursuivre la reconquête du Danelaw avec l'aide de sa sœur Æthelflæd, qui règne sur la moitié occidentale de la Mercie avec son mari Æthelred. Les campagnes d'Édouard et Æthelflæd sont couronnées de succès et voient la reconquête des principales forteresses occupées par les Vikings dans les Midlands. Après la mort de sa sœur, en 918, Édouard détrône sa fille Ælfwynn, qui lui avait succédé comme dame des Merciens, et annexe la région à son royaume. À la fin des années 910, il règne ainsi sur toute l'Angleterre au sud du Humber, et les rois du pays de Galles reconnaissent sa suzeraineté. Il meurt en 924, après avoir maté une révolte des Merciens et des Gallois à Chester. Son fils aîné Æthelstan lui succède.

 

Si les chroniqueurs médiévaux louent les succès militaires d'Édouard, les historiens modernes tendent à le négliger, notamment en raison de la rareté des sources écrites datant de son règne. Il souffre également de la comparaison avec son père. Son rôle dans la formation d'un royaume d'Angleterre unifié est réévalué à partir de la fin du XXe siècle. Alfred le Grand épouse Ealhswith, fille de l'ealdorman Æthelred Mucel, en 868. Ils ont cinq enfants qui atteignent l'âge adulte. Édouard est leur deuxième enfant, après Æthelflæd, et leur premier fils. Son nom (Eadweard en vieil anglais) est composé des éléments ead « fortune, richesse » et weard « gardien, protecteur ». Ces deux racines n'ont jamais été utilisées auparavant pour nommer les membres masculins de la maison de Wessex. D'après l'historienne Barbara Yorke, le nom d'Édouard pourrait avoir été choisi pour rappeler celui de sa grand-mère maternelle Eadburh, issue de la famille royale de Mercie, dans le but de resserrer les liens entre les deux royaumes.

 

Édouard est vraisemblablement né vers le milieu des années 870. Dans son Histoire du roi Alfred, le moine Asser rapporte qu'il est éduqué avec sa sœur cadette Ælfthryth plutôt qu'avec sa sœur aînée Æthelflæd, qui est née peu après le mariage de leurs parents. Cela suggère qu'il est plus proche en âge d'Ælfthryth que d'Æthelflæd. Il est par ailleurs décrit comme menant des troupes en 893, et son fils aîné Æthelstan voit le jour vers 894. Asser rapporte qu'Édouard et Ælfthryth sont éduqués par des précepteurs hommes et femmes qui leur font lire des textes religieux et séculiers en vieil anglais. C'est le seul cas connu chez les Anglo-Saxons d'un prince et d'une princesse recevant la même éducation. En tant que fils de roi, Édouard est un ætheling, c'est-à-dire un prince de sang royal éligible à la royauté. Sa succession n'est cependant en rien assurée, car Æthelhelm et Æthelwold, les fils d'Æthelred (frère aîné et prédécesseur d'Alfred), peuvent eux aussi prétendre au trône. La manière dont Asser décrit en détail l'éducation d'Édouard provient peut-être du désir d'Alfred de présenter son fils comme étant le plus digne d'accéder au pouvoir après sa mort6. Si Æthelhelm semble avoir disparu dans la seconde moitié des années 880 (il n'est mentionné que dans le testament d'Alfred), Æthelwold bénéficie quant à lui d'un certain statut : il figure même avant Édouard sur la seule charte qu'il atteste, signe que son rang est supérieur à celui du fils d'Alfred. Étant le roi, ce dernier bénéficie néanmoins de nombreuses opportunités de favoriser son fils. Dans son testament, il ne lègue qu'une poignée de domaines à ses neveux et réserve la majeure partie de ses propriétés à Édouard. Il promeut également des hommes susceptibles de soutenir ses projets de succession, parmi lesquels son beau-frère Æthelwulf, ealdorman en Mercie, et son gendre Æthelred, le mari d'Æthelflæd. Édouard figure comme témoin sur plusieurs des chartes de son père et l'accompagne fréquemment dans ses pérégrinations royales. Il apparaît même avec le titre de rex Saxonum sur une charte kentique de 898, ce qui suggère qu'Alfred a peut-être suivi l'exemple de son grand-père Ecgberht en nommant son fils à la tête d'un sous-royaume de Kent.

Édouard commence à participer à la guerre contre les Vikings du Danelaw dans les années 890. En 893, il remporte une victoire importante à Farnham, dans le Surrey. Il ne peut capitaliser sur ce succès, car ses troupes ont été mobilisées trop longtemps et il doit les renvoyer chez elles. Néanmoins, l'arrivée d'Æthelred à la tête d'une armée londonienne permet de sauver la situation. Les victoires de la période 893-896 semblent à mettre au crédit d'Édouard et d'Æthelred plutôt qu'à celui du roi Alfred.

Le jeune prince semble s'être marié vers 893 avec une certaine Ecgwynn qui lui donne deux enfants : un fils, Æthelstan, né vers 894, et une fille qui épouse par la suite le roi viking Sihtric Cáech. Ecgwynn n'est nommée que dans des sources postérieures à la conquête normande, qui ne s'accordent pas sur son rang : elle est de noble naissance pour Guillaume de Malmesbury, tandis que Hrotsvita de Gandersheim la décrit comme de basse extraction et indigne d'être reine. Son statut reste débattu. Simon Keynes et Richard Abels estiment qu'Ecgwynn n'était que la concubine d'Édouard, ce qui expliquerait la résistance observée dans le Wessex à l'avènement d'Æthelstan. En revanche, Barbara Yorke et Sarah Foot considèrent que c'est la querelle de succession qui a donné naissance aux accusations d'illégitimité, et non le contraire : d'après elles, Ecgwynn est bien l'épouse légitime d'Édouard. Elle est vraisemblablement morte avant 899, puisqu'au moment de la mort de son père, Édouard est marié avec Ælfflæd, la fille d'un ealdorman (probablement du Wiltshire) nommé Æthelhelm.

 

Il est possible qu'une certaine tension ait existé entre Alfred et Édouard. La Chronique anglo-saxonne, produite sous les auspices de la cour dans les années 890, ne touche mot des succès militaires d'Édouard. Ces derniers ne sont mentionnés que dans la chronique latine d'Æthelweard (fin du Xe siècle), qui décrit les talents militaires du prince et sa popularité auprès des jeunes guerriers. La source d'Æthelweard pourrait être une version pro-Édouard de la Chronique. Vers la fin de sa vie, Alfred organise une cérémonie d'investiture en faveur de son petit-fils Æthelstan. La signification exacte de cette cérémonie est incertaine, mais il est possible qu'Alfred ait envisagé de partager son royaume entre Édouard et Æthelstan. À la mort d'Alfred, le 26 octobre 899, Édouard lui succède, mais Æthelwold revendique lui aussi le trône. À la tête d'une armée, il s'empare des domaines royaux de Wimborne et Christchurch, dans le Dorset. Le premier revêt une importance symbolique particulière, car c'est là que son père Æthelred est inhumé. Édouard réagit en menant des troupes jusqu'au fort voisin de Badbury Rings, sur quoi Æthelwold s'enfuit pour se réfugier en Northumbrie, dont la population danoise l'accepte comme roi. Édouard est sacré le 8 juin 900, à Kingston upon Thames d'après le chroniqueur du XIIe siècle Raoul de Dicet, mais la cérémonie pourrait en réalité avoir eu lieu à Winchester.

 

Æthelwold rassemble une flotte et débarque dans l'Essex en 901. L'année suivante, il convainc les Danois d'Est-Anglie d'envahir la Mercie et le Wessex, où ils se livrent au pillage avant de regagner leurs bases. Édouard mène à son tour un raid en Est-Anglie, mais les troupes du Kent n'obéissent pas lorsqu'il donne l'ordre de battre en retraite et sont interceptées par les Danois. Les deux armées s'affrontent à la bataille du Holme (peut-être Holme, dans le Cambridgeshire), le 13 décembre 902. Bien que les Danois en sortent victorieux, ils subissent de lourdes pertes, parmi lesquelles leur roi Eohric, ainsi qu'Æthelwold lui-même. Sa disparition met un terme à la menace pesant sur le trône d'Édouard. Bien qu'aucun affrontement ne soit mentionné dans les sources pour les années qui suivent la bataille du Holme, l'état de guerre entre le Wessex et les Vikings se poursuit apparemment jusqu'en 906, date à laquelle Édouard conclut la paix avec les Danois d'Est-Anglie et de Northumbrie. Une version de la Chronique anglo-saxonne précise qu'il agit « par nécessité », ce qui pourrait impliquer qu'il a été contraint de leur verser un tribut. En 909, il envoie une armée composée de Saxons et de Merciens attaquer la Northumbrie. Cette expédition parvient à récupérer les reliques de saint Oswald à l'abbaye de Bardney, dans le Lincolnshire, et les Danois doivent accepter la paix aux termes d'Édouard. L'année suivante, ils reprennent l'initiative en attaquant la Mercie, mais leurs troupes sont interceptées sur le chemin du retour et subissent une lourde défaite à la bataille de Tettenhall. Dès lors, les Danois de Northumbrie ne s'aventurent plus au sud du Humber, ce qui permet à Édouard et à ses alliés de concentrer leurs efforts sur la reconquête de l'Est-Anglie et des Cinq Bourgs (Derby, Leicester, Lincoln, Nottingham and Stamford) de Mercie orientale.

À la mort d'Æthelred, en 911, sa veuve Æthelflæd continue à régner sur les Merciens, mais Édouard prend le contrôle des régions de Londres et d'Oxford. Ils mènent ensemble une campagne de fortification des régions reprises aux Vikings. En novembre 911, Édouard fonde ainsi une forteresse à Hertford, au nord de la Lea, afin de défendre les environs contre les Danois basés à Bedford et à Cambridge. L'année suivante, il mène ses troupes à Maldon, dans l'Essex, et ordonne la construction d'un fort à Witham et d'une autre fortification à Hertford. Ce faisant, il renforce les défenses de Londres et accroît son autorité sur l'Essex.

 

En 914, une flotte viking venue de Bretagne entre dans l'estuaire de la Severn et attaquent l'Ergyng, dans le sud-est du pays de Galles. Pour sauver l'évêque Cyfeilliog, capturé par les envahisseurs, Édouard verse une rançon conséquente de quarante livres d'argent. Battus par les troupes de Hereford et Gloucester, les Vikings prêtent des serments et offrent des otages pour obtenir la paix. L'armée saxonne laissée par Édouard dans la région au cas où ces serments seraient brisés repousse deux nouvelles attaques avant que les Vikings ne partent pour l'Irlande à l'automne. Cet épisode laisse entendre que l'Ergyng se trouve dans la sphère d'influence du Wessex, contrairement à son voisin du nord, le Brycheiniog, qui appartient à l'orbite mercienne.

À la fin 914, Édouard fonde deux forteresses à Buckingham et reçoit la soumission du comte Thurketil, le chef de l'armée danoise basée à Bedford. Il occupe cette ville l'année suivante et fonde un fort sur la rive sud de la Great Ouse, en face du fort viking situé sur l'autre rive. En 916, Édouard revient dans l'Essex pour fortifier Maldon, ce qui améliore les défenses de Witham. Il aide également Thurketil et les siens à quitter l'Angleterre, réduisant ainsi les forces vikings dans les Midlands.

L'année 917 est décisive. Édouard fonde deux forteresses supplémentaires, à Towcester contre les Danois de Northampton et à Wigingamere (endroit non identifié). Une offensive danoise sur Towcester, Bedford et Wigingamere se solde par un échec, tandis qu'Æthelflæd s'empare de la ville de Derby, profitant du manque de coordination entre les armées vikings. Tempsford, dans le Bedfordshire, tombe aux mains des Anglais à la fin de l'été et le dernier roi danois d'Est-Anglie est tué ; Colchester est également capturée. Les Vikings réagissent en envoyant une importante armée assiéger Maldon, mais la garnison tient bon et les Danois subissent de lourdes pertes. De retour à Towcester, Édouard fait construire une enceinte en pierre pour renforcer ses défenses et reçoit la soumission des Vikings de Northampton, bientôt imités par ceux de Cambridge et d'Est-Anglie. À la fin de l'année, les dernières armées danoises qui résistent aux Anglais sont celles des Cinq Bourgs de Leicester, Stamford, Nottingham et Lincoln.

 

Leicester se soumet pacifiquement à Æthelflæd au début de l'année 918, et les Danois de Jórvík entrent également en contact avec elle pour lui prêter allégeance, vraisemblablement parce qu'ils craignent les Norvégiens venus d'Irlande qui les menacent, mais la dame de Mercie meurt le 12 juin avant d'avoir pu accepter. Cette offre ne semble pas avoir été renouvelée à Édouard, et Jórvík est conquise par les Norvégiens en 919. La Chronique anglo-saxonne rapporte que la Mercie se soumet à Édouard après la mort d'Æthelflæd, mais les versions merciennes de ce texte indiquent au contraire que le roi du Wessex a évincé sa nièce Ælfwynn, la fille d'Æthelflæd, pour annexer la région à son royaume. Stamford et Nottingham reconnaissent l'autorité d'Édouard vers cette période, ce qui suggère que son autorité s'étend alors sur toute l'Angleterre au sud du Humber, à l'exception peut-être de Lincoln, où des pièces des Vikings d'York semblent avoir été frappées dans les années 920. Certains chefs danois conservent leurs domaines, mais Édouard doit également récompenser ses fidèles en leur offrant des terres dans la région, sans compter celles qu'il garde pour son usage propre. Son monnayage suggère qu'il exerce davantage d'autorité dans l'est des Midlands qu'en Est-Anglie. Les rois gallois Hywel Dda, Clydog et Idwal Foel, jusqu'alors vassaux d'Æthelflæd, prêtent également allégeance à Édouard après la mort de leur suzeraine. Peu après avoir maté cette révolte, Édouard meurt dans le domaine royal de Farndon, à une quinzaine de kilomètres au sud de Chester, le 24 juillet 924. Il est inhumé au New Minster de Winchester. Cette abbaye est déplacée hors des murs de la ville en 1109 pour devenir l'abbaye de Hyde, où les restes d'Édouard et de sa famille sont transférés.

 

Dans son entrée pour l'année 924, le manuscrit A de la Chronique anglo-saxonne se contente de rapporter la mort d'Édouard et l'avènement de son fils aîné Æthelstan, mais la succession pourrait avoir été plus complexe. Les manuscrits C et D, d'origine mercienne, signalent également la mort d'Ælfweard, le deuxième fils d'Édouard, très peu de temps après son père (16 jours seulement d'après D), et précisent qu'Æthelstan est choisi comme roi par les Merciens. Il est possible que les deux fils d'Édouard aient été élus rois, Æthelstan par la noblesse de Mercie et Ælfweard par la noblesse du Wessex. La liste des rois du Wessex qui figure dans le Textus Roffensis, un manuscrit du XIIe siècle, attribue un règne de quatre semaines à Ælfweard entre Édouard et Æthelstan. Les intentions d'Édouard concernant sa succession sont inconnues, mais des indices suggèrent qu'il aurait pu favoriser Ælfweard. Quoi qu'il en soit, la mort prématurée de ce dernier permet à Æthelstan de recueillir l'intégralité de la succession.

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