Charles 1er
Charles Ier, né le 19 novembre 1600 à Dunfermline et mort le 30 janvier 1649 à Londres, est roi d'Angleterre, d'Écosse et d'Irlande de 1625 à son exécution en 1649.
Petit fils de Marie Stuart et fils de Jacques Stuart, il succède à ce dernier à sa mort, le 27 mars 1625. Dès le début de son règne, Charles Ier affronta le Parlement d'Angleterre pour accroître ses revenus, alors que ce dernier cherchait à limiter les prérogatives royales, que le roi considérait être de droit divin. Ses interférences dans les affaires religieuses des Églises d'Angleterre et d'Écosse, et ses hausses d’impôts sans l'accord du Parlement furent très mal acceptées par certains prédicateurs protestants, qui le considéraient comme un monarque absolu et un tyran. Son refus de soutenir les forces protestantes durant la guerre de Trente Ans, associé à son mariage avec une princesse catholique, Henriette Marie de France, soulevaient des interrogations quant à sa religion. Charles Ier s'allia également à des figures ecclésiastiques controversées, comme Richard Montagu et William Laud, qu'il nomma archevêque de Cantorbéry. De nombreux sujets, dont les puritains, considéraient que cela rapprochait trop l'Église d'Angleterre de l'Église catholique. Ses tentatives pour imposer des réformes religieuses en Écosse furent la cause des guerres des évêques, qui renforcèrent la position des parlements anglais et écossais, et précipitèrent la chute du roi.
Les dernières années de Charles Ier furent marquées par la première Révolution anglaise, au cours de laquelle il affronta les forces parlementaires. Ses troupes furent défaites lors de la première guerre civile (1642-1645), le Parlement escomptait alors qu'il accepterait ses demandes de monarchie constitutionnelle, mais il refusa de négocier, et forgea une alliance avec l'Écosse, avant de s'enfuir sur l'île de Wight. Cela déclencha une deuxième guerre civile (1648-1649), et Charles Ier fut de nouveau battu, puis arrêté, jugé et exécuté pour haute trahison. La monarchie fut alors abolie et une république, appelée Commonwealth d'Angleterre fut instaurée, avec Oliver Cromwell à sa tête. En 1660, la monarchie fut restaurée et le fils aîné de Charles Ier monta sur le trône, sous le nom de Charles II.
Charles Ier est né le 19 novembre 1600 au palais de Dunfermline à Fife en Écosse, quatrième enfant et second fils de Jacques VI d'Écosse et d'Anne de Danemark. Il fut baptisé le 2 décembre 1600 par l'évêque de Ross, David Lindsay en l'abbaye d'Holyrood et fait duc d'Albany, marquis d'Ormond, comte de Ross et lord Ardmannoch.
C'était un enfant fragile et maladif. Lorsque la reine Élisabeth Ire d'Angleterre mourut en mars 1603 et que son père Jacques VI d'Écosse devint roi d'Angleterre sous le nom de Jacques Ier, Charles ne put faire le voyage de Londres le mois suivant, en raison de sa santé précaire, contrairement à tous ses parents, et frères et sœurs. Il resta en Écosse et fut confié à la charge de son tuteur, Alexander Seton, ami de son père.
En 1604, à trois ans et demi, Charles pouvait enfin marcher sans aide sur toute la longueur de la grande salle du palais de Dunfermline. On décida qu'il était assez fort pour faire le voyage d'Angleterre et rejoindre sa famille. Il quitta l'Écosse le 13 juillet 1604. En Angleterre, Charles fut confié à Alletta (Hogenhove) Carey, épouse hollandaise du courtisan Robert Carey ; elle lui apprit à parler et insista pour qu'il portât des bottes faites de cuir espagnol et de laiton pour renforcer ses faibles chevilles. Charles parvint finalement à surmonter tous ses problèmes physiques, sans doute causés par le rachitisme.
Charles était moins estimé que son frère aîné Henri-Frédéric, qu'il adorait et essayait d'imiter. En 1605, Charles fut fait duc d'York comme cela est la coutume pour le second fils du monarque. Mais Henri mourut soudainement d'une fièvre typhoïde, à l'âge de 18 ans en 1612, deux semaines avant le 12e anniversaire de Charles. Ce dernier devint alors prince héritier, et reçut automatiquement plusieurs titres, dont ceux de ducs de Rothesay et de Cornouailles10. Quatre ans plus tard, en novembre 1616, il devint prince de Galles, et comte de Chester.
En 1613, sa sœur Élisabeth épousa Frédéric V du Palatinat, et s'installa à Heidelberg. En 1617, le catholique Ferdinand II fut élu roi de Bohême. Refusant ses politiques religieuses, ses sujets protestants le renversèrent ; ils élurent à sa place Frédéric V, chef de l'Union protestante. L'acceptation par ce dernier de la couronne de Bohême en 1619 bouleversa le fragile équilibre entre protestants et catholiques au sein du Saint-Empire romain germanique, et les troubles débouchèrent sur la guerre de Trente Ans. Jacques Ier, qui soutenait son beau-fils Frédéric, cherchait à marier le nouveau prince de Galles à la princesse Marie-Anne d'Espagne, pour se rapprocher de l'Espagne, et utiliser la dot pour résoudre ses problèmes financiers.
Les tractations diplomatiques avec l'Espagne se révélèrent impopulaires auprès de l'opinion publique anglaise et au sein de la cour de Jacques Ier ; seuls les arminianistes étaient favorables à cette union. Le Parlement était ouvertement hostile à Philippe III d'Espagne, et espérait que Jacques Ier mène une croisade pour soutenir les protestants sur le continent, contre la domination des Habsbourg. Dans le même temps, le Parlement, mené par George Villiers, 1er duc de Buckingham, obtint la destitution et le procès pour corruption du lord chancelier Francis Bacon. La condamnation de Bacon par les lords fut la première depuis 1459 qui eut lieu sans l'approbation officielle du roi par une sanction sans procès. L'incident marqua un important précédent pour la définition de la capacité du Parlement à protéger les intérêts de la nation, et à mener des procès comme il le fit plus tard contre Villiers, Laud, Wentworth, et Charles Ier. Le Parlement et Jacques Ier s'opposaient également sur la politique étrangère. Le roi considérait que la Chambre des communes ne devait gérer que les affaires intérieures tandis que les députés estimaient qu'ils avaient le droit d'en débattre, du fait de la liberté d'expression garantie au sein des murs du Parlement. Charles semblait défendre la cause de son beau-frère, mais considérait que les discussions sur son mariage à la Chambre des communes étaient insolentes et en violation des prérogatives royales. En janvier 1622, Jacques Ier décida de dissoudre le Parlement.
Charles et le duc de Buckingham, son favori, qui avait une grande influence sur le prince, se rendirent secrètement en Espagne en 1623 pour essayer de trouver un accord sur un mariage. Ce voyage se révéla être un échec total ; les Espagnols demandaient comme conditions que Charles se convertisse au catholicisme, et qu'il reste en Espagne un an après le mariage, pour s'assurer que l'Angleterre respecterait tous les termes du traité. Charles était outré, et à leur retour en octobre, Buckingham et lui demandèrent que le roi déclare la guerre à l'Espagne.
Avec le soutien de ses conseillers protestants, Jacques Ier convoqua le Parlement en 1623 pour qu'il puisse obtenir des fonds pour la guerre. Sur les injonctions de Charles et de Buckingham, Jacques Ier approuva la destitution du lord trésorier Lionel Cranfield par la Chambre des communes ; Sa disgrâce fut similaire à celle de Bacon.
Jacques Ier demanda également que le Parlement approuve le mariage du prince de Galles et de la princesse Henriette Marie de France, que Charles avait rencontrée à Paris lors de son voyage vers l'Espagne. L'union était intéressante, car elle était la sœur du roi Louis XIII de France, qui était opposé aux Habsbourg. Le Parlement accepta à contre-cœur le mariage, avec la promesse de Jacques Ier et de Charles que l'union n'entraînerait pas l'octroi de la liberté de religion aux catholiques en dehors de la résidence de la princesse. En 1624, Jacques Ier devint de plus en plus malade, et il lui devenait difficile de contrôler le Parlement. À sa mort en mars 1625, Charles et le duc de Buckingham étaient déjà de fait à la tête du royaume.
Charles Ier et Jacques Ier défendaient tous deux l'idée d'une monarchie de droit divin, mais si les ambitions absolutistes de Jacques Ier étaient tempérées par des compromis avec ses sujets, Charles Ier considérait qu'il n'avait aucunement besoin de l'approbation du Parlement, et que ses politiques étrangères (qui étaient très coûteuses et fluctuantes) ne devaient subir aucune entrave. Charles Ier jugeait qu'il n'avait pas besoin de négocier ou d'expliquer ses actions, et qu'il ne devait en répondre qu'à Dieu. Il déclara à ce sujet : « les rois n'ont à rendre compte de leurs actions qu'à Dieu seul ».
Le 11 mai 1625, Charles fut marié par procuration à Henriette Marie devant les portes de la cathédrale Notre-Dame de Paris, avant que le Parlement n'ait pu se rassembler pour interdire la publication des bans. De nombreux députés étaient opposés à l'union du roi avec une catholique, car ils craignaient que Charles Ier ne lève les discriminations à l'encontre des catholiques, et ne sape l'autorité de l'Église d'Angleterre. Même s'il avait assuré au Parlement qu'il ne relâcherait pas les restrictions concernant les récusants, il promit toutefois de le faire dans une clause secrète du contrat de mariage signé avec Louis XIII. De plus, Charles Ier promit, dans le cadre du mariage, d'apporter son soutien aux efforts français pour réprimer la révolte des huguenots de La Rochelle ; cela représentait un renversement complet de la longue politique anglaise concernant les guerres de religion en France. Le couple se maria en personne le 13 juin 1625 à Cantorbéry. Charles Ier fut couronné le 2 février 1626 en l'abbaye de Westminster, mais Henriette Marie fut obligée de rester à l'extérieur, en raison de la polémique. Ils eurent sept enfants dont trois fils et trois filles atteignirent l'âge adulte.
Les inquiétudes concernant les politiques religieuses de Charles Ier s'accrurent en raison de son soutien à un ecclésiastique controversé, Richard Montagu. Dans ses pamphlets, il s'opposait à la prédestination calviniste, et entra en conflit avec les puritains. Lorsqu'un député puritain de la Chambre des communes, John Pym, attaqua le pamphlet de Montagu lors d'un débat, ce dernier demanda l'aide du roi dans un pamphlet appelé Appello Caesarem en référence à la défense de Paul de Tarse contre les persécutions dont il était victime de la part des juifs. Charles Ier fit de Montagu l'un des chapelains royaux, ce qui accrut la méfiance de nombreux puritains qui craignaient que cette promotion de l'arminianisme ne soit une tentative clandestine pour permettre une résurgence du catholicisme au sein de l'Église d'Angleterre.
Au début de son règne, Charles Ier était principalement préoccupé par la politique étrangère. De son point de départ en Bohême, la guerre de Trente Ans dégénérait en un conflit européen. En 1620, Frédéric V fut battu lors de la bataille de la Montagne-Blanche, et malgré l'aide de volontaires anglais, ses territoires héréditaires dans l'électorat du Palatinat avait été conquis par l'empereur Ferdinand II40. Ayant accepté d'aider son beau-frère à reprendre le Palatinat, Charles Ier déclara la guerre à l'Espagne, dont le nouveau roi catholique, Philippe IV, avait déployé des forces pour participer à l'occupation du Palatinat.
Le Parlement préférait mener une guerre maritime peu coûteuse contre les colonies espagnoles dans le Nouveau Monde en espérant que la capture de la flotte des Indes permette de financer la guerre. Charles Ier privilégiait néanmoins une politique plus agressive et coûteuse sur le continent. Le Parlement accorda seulement 140 000 £ (350 millions de livres de 2011) pour la guerre, une somme insuffisante pour Charles Ier. De plus, la Chambre des communes chercha à limiter l'octroi au roi des bénéfices des taxes douanières à un an, même si depuis 1414 ce droit était attribué à vie et représentait une grande part des revenus du souverain. Le Parlement pensait pouvoir ainsi contrôler les dépenses en forçant Charles Ier à demander le renouvellement de cette pension chaque année. Même si elle fut adoptée par la Chambre des communes, les alliés de Charles Ier à la Chambre des lords menés par le duc de Buckingham refusèrent de voter la loi, et elle fut donc rejetée. Charles Ier continua de collecter les taxes, même si aucune législation ne lui en donnait le droit.
La guerre de l'Angleterre contre l'Espagne, sous le commandement de Lord Buckingham, subit plusieurs revers et la Chambre des communes se préparait à lancer une procédure de destitution contre le duc. En réaction, le roi le nomma chancelier de l'université de Cambridge et le 12 juin 1626, la Chambre des communes délivra une protestation ouverte, déclarant : « Nous déclarons à votre Majesté et au monde entier que jusqu'à ce que ce grand ministre ne se mêle plus des affaires de l'État, nous ne pouvons espérer aucun bon succès, et qu'au contraire, nous craignons que tout l'argent que nous pourrions donner à votre Majesté ne tourne au préjudice de votre royaume par le mauvais emploi que cet homme en fera ». Malgré les protestations, Charles Ier refusa de limoger son ami, et préféra alors dissoudre le Parlement.
L'agitation populaire causée par cette décision fut exacerbée par la décision de lever des fonds pour la guerre par le biais d'un « emprunt forcé » : une taxe mise en place sans le consentement du Parlement. En novembre 1627, dans ce qui fut appelé l'« affaire des cinq gentilshommes », la Cour du Banc du Roi jugea que l'emprisonnement sans procès de ceux qui refusaient de payer l'emprunt forcé était une violation du droit à un jugement équitable établi par la Magna Carta de 1215. Convoqué à nouveau en 1628, le Parlement adopta le 26 mai la Pétition des Droits, qui demandait au roi de reconnaître qu'il ne pouvait pas lever de taxes sans l'accord du Parlement, ni imposer la loi martiale aux civils, les emprisonner sans procès équitable ou cantonner des troupes dans leurs résidences. Charles Ier approuva la pétition même s'il continua de revendiquer le droit de collecter les revenus des taxes douanières sans l'autorisation du Parlement.
Bien que Charles Ier ait promis de soutenir la lutte contre les huguenots révoltés de La Rochelle, il renia sa promesse et, sous le commandement de Lord Buckingham, lança une offensive mal préparée contre la forteresse française de Saint-Martin-de-Ré. L'attaque de Buckingham poussa Louis XIII et Richelieu à assiéger la principale place forte huguenote de La Rochelle, et elle accrut la détestation du Parlement contre l'« éminence grise » du souverain.
Buckingham fut assassiné par un puritain fanatique, John Felton, le 23 août 1628. Les réjouissances publiques à l'annonce de sa mort aggravèrent le fossé qui existait entre la cour et le peuple, et entre la Couronne et la Chambre des communes. Même si la mort de Buckingham mit effectivement fin à la guerre avec l'Espagne, et évacua la question posée par son influence, elle ne mit pas un terme aux conflits entre Charles Ier et le Parlement sur les questions fiscales et religieuses.
Le Long Parlement se réunit en novembre 1640 et se révéla aussi difficile à gérer pour Charles Ier que l'avait été le Court Parlement. Il lança rapidement une procédure de destitution contre Laud pour haute-trahison qui fut couronnée de succès le 18 décembre. Le lord du Sceau Privé John Finch fut destitué le lendemain et il s'enfuit pour La Haye avec l'accord du monarque le 21 décembre. Pour empêcher le roi de le dissoudre à son gré, le Parlement vota le Dissolution Act qui reçut une sanction royale en février 1641. La législation imposait que le Parlement soit réuni pour une session d'au moins cinquante jours tous les trois ans et que si le roi ne le convoquait pas, les députés pouvaient se rassembler de leur propre chef.
Le 22 mars 1641, Strafford, qui était devenu la cible des parlementaires, en particulier de John Pym, fut jugé pour haute-trahison105. Les preuves fournies par Henry Vane accusaient Strafford d'avoir utilisé l'armée irlandaise pour menacer l'Angleterre mais ces dernières ne furent pas corroborées et les charges furent abandonnées le 10 avril106. Pym demanda immédiatement une action de disgrâce signifiant essentiellement que, quels que soient les torts de Strafford, il pourrait être exécuté sur un simple vote du Parlement. Charles Ier assura néanmoins Strafford qu'il ne signerait pas la loi et les lords s'opposaient à la sévérité de la sentence. Néanmoins la révélation d'un projet de coup d'État par l'armée en faveur de Strafford fit évoluer les opinions. La loi fut facilement adoptée par la Chambre des communes (204 voix pour, 59 contre et 250 abstentions), par la Chambre des lords et Charles Ier, craignant pour la sécurité de sa famille, la signa le 10 mai. Le comte de Strafford fut décapité deux jours plus tard.
En mai 1641, Charles Ier approuva une législation sans précédent qui empêchait la dissolution du Parlement anglais sans l'accord du Parlement. La Ship Tax, la Distraint of Knighthood et les emprunts forcés furent déclarés illégaux, les monopoles furent démantelés et les tribunaux de la Chambre étoilée et de la Haute-Commission furent abolis par l'Habeas Corpus et le Triennial Act112. Toutes les autres formes de taxation furent légalisées et régulées par le Tonnage and Poundage Act. Le 3 mai, le Parlement adopta la Protestation de 1641 par laquelle ceux qui signaient la pétition promettaient de défendre la « véritable religion réformée », le Parlement et l'honneur, les possessions et la personne du roi. Durant le mois de mai, la Chambre des communes adopta plusieurs législations attaquant les évêques et l'épiscopalisme en général mais ces lois furent toutes rejetées par la Chambre des lords.
Même s'il avait consenti à plusieurs concessions importantes, Charles Ier renforça sa position militaire en obtenant le soutien des Écossais durant l'été après avoir promis l'établissement officiel du presbytérianisme. Il parvint ainsi à rassembler les opposants au Parlement mais un complot royaliste visant à enlever un groupe de nobles écossais sapa sa crédibilité.
À l'instar de ce qu'avait fait le Parlement anglais dans son opposition à Lord Buckingham mais d'une manière moins hypocrite, les vieux Anglais du Parlement irlandais avancèrent que leur opposition à Lord Strafford n'avait pas affecté leur loyauté envers Charles Ier. Ils affirmèrent que ce dernier avait été mis en erreur par l'influence néfaste du comte et que du fait de l'ambiguïté entourant la Loi Poynings (en), un vice-roi comme Strafford pouvait se comporter comme un despote. Néanmoins, à la différence de leurs homologues vieux anglais qui étaient catholiques, les colons appelés « nouveaux Anglais » étaient protestants et pouvaient être rapprochés des députés anglais et des puritains et étaient donc fondamentalement opposés à la Couronne en raison des événements se déroulant en Angleterre.
De nombreuses disputes opposaient les natifs irlandais et les colons au sujet du transfert de propriétés foncières des catholiques vers les protestants119 en particulier dans le cadre de la Plantation d'Ulster. Associé au remplacement graduel du Parlement irlandais par le Parlement anglais, elles furent à l'origine de la conflagration irlandaise qui devint le catalyseur des affrontements en Angleterre entre les royalistes et les parlementaires. L'exécution de Strafford affaiblit l'influence de Charles Ier en Irlande tout en fournissant une raison pour une coopération entre les Irlandais gaëls et les vieux Anglais qui étaient jusqu'alors profondément antagonistes. Ainsi, dans le conflit entre les Irlandais gaëls et les colons nouveaux Anglais lors de la rébellion irlandaise, les vieux Anglais s'allièrent avec les premiers tout en témoignant de leur loyauté envers le roi.
En novembre 1641, la Chambre des communes adopta la Grande Remontrance, une longue liste de griefs contre les actions des ministres de Charles Ier commises depuis le début de son règne et faisant partie d'une supposée conspiration catholique dans laquelle le roi était un membre involontaire. Son principal artisan, John Pym, avait cependant été très loin et la loi ne fut adoptée qu'avec 11 voix d'avance (159 voix pour, 148 contre et plus de 200 abstentions126) ; de plus le texte accusait les membres de la Chambre des lords d'être coupable d'obstruction aux réformes et ces derniers rejetèrent largement le texte. Les tensions atteignirent leur paroxysme lorsque les nouvelles de la rébellion irlandaise atteignirent le Parlement et de fausses rumeurs accusaient le roi d'être complice dans le soulèvement. L'armée irlandaise catholique, établie par Strafford, dont la dissolution avait été demandée à trois reprises par la Chambre des communes déclara son allégeance à Charles Ier. Cela associé aux massacres des nouveaux Anglais protestants par les catholiques irlandais acheva de convaincre le Parlement anglais que le roi avait perdu son autorité et sa capacité à gouverner. Durant le mois de novembre, les récits concernant les événements en Irlande et l'existence de supposés complots papistes en Angleterre furent publiés sous la forme de pamphlets alarmistes qui circulèrent dans tout le royaume.
Le Parlement anglais n'avait plus confiance dans les motivations de Charles Ier quand ce dernier demanda des fonds pour réprimer la rébellion irlandaise car de nombreux députés craignaient que ces forces ne soient par la suite utilisées contre le Parlement. La loi sur la milice était destinée à retirer de force le contrôle de l'armée par le roi mais elle ne disposait pas du soutien des lords et encore moins du roi. Dans une tentative pour renforcer sa position, Charles Ier plaça la tour de Londres sous le commandement du colonel Thomas Lunsford (en), un officier efficace mais tristement célèbre pour avoir tenté d'assassiner un député en 1633. Lorsque le roi apprit de rumeurs que le Parlement voulait destituer son épouse catholique133, Charles Ier décida de prendre des mesures drastiques qui non seulement mirent fin à l'impasse entre le Parlement et lui mais signalèrent également le début de la guerre civile.
Charles Ier supposa, à raison, qu'il s'agissait des membres du Parlement anglais qui s'étaient rapprochés des Écossais lors de leur invasion en 1640. Le 3 janvier 1642, il demanda que le Parlement lui livre cinq de ses membres pour qu'ils soient jugés pour haute-trahison. Lorsque le Parlement refusa, cela fut peut-être Henriette Marie qui le persuada de les arrêter par la force et Charles Ier décida de s'en charger personnellement. Les nouvelles atteignirent le Parlement avant lui et les hommes recherchés, John Pym, John Hampden, Denzil Holles, William Strode et Arthur Haselrig, s'échappèrent peu avant que Charles Ier n'entre dans la Chambre des communes avec une escorte armée le 4 janvier 1642. Face au silence de la Chambre, il exigea que son président, William Lenthall, lui désigne les intéressés ; celui-ci lui adressa sa célèbre réplique : « Je n'ai point d'yeux pour voir, ni de langue pour parler en ce lieu, sauf à suivre les directives de la Chambre, dont je suis ici le serviteur ». Le roi fut donc contraint de se retirer bredouille.
Cette tentative d'arrestation bâclée se révéla politiquement désastreuse pour Charles Ier. Ce fut la seule fois de l'histoire qu'un souverain britannique entrait de force dans la Chambre des communes136. D'un coup, Charles Ier avait réduit à néant les arguments de ses partisans selon lesquelles le roi était le seul rempart contre le chaos. Le 5 janvier, la Chambre des communes se rassembla pour dénoncer cette atteinte à ses droits, ajourna ses travaux et nomma un comité de vingt-quatre députés. Le peuple londonien ainsi que le Conseil municipal prirent rapidement fait et cause pour le Parlement. En attendant de pouvoir réellement mobiliser des forces importantes, le roi et le parlement se livrèrent à une guerre des communiqués de propagande. Ne se sentant pas en sécurité à Londres même, le roi se réfugia le 12 janvier au château de Windsor. Le 23 février, la reine et sa fille s'embarquaient à Douvres pour les Pays-Bas.
Au printemps 1642, les deux camps rassemblèrent leurs forces en vue de la conflagration à venir. En avril, le roi part à Hull pour prendre possession de l'arsenal, mais le gouverneur de la ville fidèle au Parlement le repousse. Pour ne pas apparaître comme un fauteur de guerre, le Parlement envoya au roi début juin 1642 ses « Dix-neuf propositions » pour que la paix soit préservée, contre d'importantes concessions royales. Le roi rejeta en totalité les demandes, refusant par déclaration du 18 juin ce qu’il considérait, à juste titre, comme une transformation radicale du gouvernement traditionnel du royaume. En conséquence, le 12 juillet, les Communes votaient la levée d’une armée. Charles Ier partit pour Nottingham où il entreprit de lever une armée contre le Parlement, s'y s'installant le 22 août 1642, puis à Oxford d'où il contrôlait les Midlands, le pays de Galles, le West Country et le Nord de l'Angleterre. Le Parlement conservait Londres, l'Est et le Sud-Est de l'Angleterre. Charles Ier rassembla ses troupes en utilisant la méthode archaïque de la Commission of array par laquelle les commissaires, qui étaient des officiers expérimentés, pouvaient enrôler tous les hommes valides de leur comté.
La première guerre civile éclata véritablement le 26 octobre 1642 avec la bataille de Edgehill, qui se révéla indécise. Aucun camp ne parvint à prendre l'avantage jusqu'à ce que la bataille de Naseby le 14 juin 1645 ne fasse définitivement pencher la balance du côté des parlementaires. Le roi avait quitté Oxford en avril 1646 avant que la ville ne soit assiégée (en)141 et il chercha refuge auprès de l'armée presbytérienne écossaise à Newark-on-Trent avant d'être emmené à Southwell où il resta le temps que ses « hôtes » ne décident de son avenir. Les Écossais décidèrent finalement de le livrer au Parlement en 1647.
Il fut emprisonné à Holdenby House dans le Northamptonshire jusqu'à ce que l'officier George Joyce ne l'emmène de force à Newmarket au nom de la New Model Army, créée en 1645 pour professionnaliser l'armée parlementaire. À ce moment, la New Model Army se sentait négligée et ignorée par le Parlement et Charles Ier était impatient de profiter de ces tensions. Il fut transféré à Oatlands puis au château de Hampton Court où des négociations se poursuivirent sans résultats. Il considéra qu'il serait dans son intérêt de s'évader et de s'enfuir peut-être en France ou de se mettre sous la protection du colonel Robert Hammond, le gouverneur parlementaire de l'île de Wight dont il pensait qu'il lui était favorable. Il choisit cette seconde option et s'échappa le 11 novembre. Cela se révéla une erreur car Hammond le fit emprisonner dans le château de Carisbrooke.
Depuis sa cellule, Charles Ier continua de négocier avec les différents groupes. Le 26 décembre 1647, il signa un traité secret avec les Écossais par lequel ces derniers envahiraient l'Angleterre pour le restaurer en échange de quoi le presbytérianisme deviendrait la religion officielle pendant trois ans.
Les royalistes se soulevèrent à nouveau en juillet lors de la deuxième guerre civile et comme convenu avec Charles Ier, les Écossais entrèrent en Angleterre. La plupart des soulèvements en Angleterre furent rapidement écrasés par les troupes parlementaires loyales à Oliver Cromwell mais les révoltes dans le Kent, l'Essex, le pays de Galles et le Cumberland ainsi que l'invasion écossaise entraînèrent des batailles rangées et des sièges prolongés. Néanmoins après la défaite écossaise lors de la bataille de Preston en août, les royalistes avaient perdu tout espoir de remporter le conflit.
Le « Long Parlement » n'était initialement pas favorable au renversement du roi. La biographie d'Henry Vane le Jeune, « un membre influent de toutes les commissions qui fut chargé du devenir du roi » indique que « durant les négociations avec le roi, il démontra qu'il voulait faire tout ce qui était possible pour profiter de l'opportunité de sécuriser les bienfaits de la liberté ». Finalement, Charles Ier accepta les réformes proposées par les parlementaires et elles furent acceptées par la Chambre des communes par 129 voix contre 83 le 1er décembre 1648. Cela aurait permis la restauration du roi avec des pouvoirs limités et la fin de la guerre civile mais Cromwell et Thomas Pride étaient opposés à ces mesures et demandaient que le roi soit jugé pour haute-trahison. Le 6 décembre, Pride entra dans le Parlement avec deux régiments de l'armée et exclut tous ceux qui étaient favorables au roi. Le reste des députés forma le « Parlement croupion ».
Charles Ier fut décapité le 30 janvier 1649. Il fut rapporté qu'il portait des vêtements chauds pour empêcher le froid de le faire trembler, ce que la foule aurait pu interpréter comme de la peur1. Charles Ier était séparé de la foule par plusieurs rangs de soldats et son dernier discours ne fut entendu que par ceux présents sur l'échafaud. Il déclara qu'il avait comme beaucoup désiré la liberté de son peuple mais « je dois vous dire que la liberté consiste à avoir un gouvernement… elle ne consiste pas pour le peuple à gouverner lui-même ; un sujet et un souverain sont deux choses clairement différentes ». Il posa sa tête sur le billot après avoir récité une prière et fit signe au bourreau qu'il était prêt ; il fut décapité d'un seul coup de hache et ses derniers mots furent « Je vais d'une corruptible à une incorruptible Couronne, où aucun dérangement ne peut être ».
Le prêtre Philip Henry nota qu'après l'exécution, un gémissement de la foule fut entendu et certains spectateurs trempèrent leurs foulards dans le sang du souverain, initiant ainsi le culte du roi martyr ; néanmoins, aucun autre témoignage, dont celui de Samuel Pepys, ne corrobore ces affirmations. Le compte-rendu de Henry fut rédigé durant la Restauration, douze ans après l'événement, et sa famille et lui étaient des écrivains propagandistes royalistes. Le bourreau portait un masque et son identité fait l'objet de débats mais le nom de Richard Brandon, le bourreau du peuple de Londres, est le plus souvent cité. Il était courant que la tête d'un traître soit prise et montrée à la foule avec la phrase « Observez la tête d'un traître ! ». Même si la tête de Charles Ier fut montrée, la phrase ne fut pas utilisée. Oliver Cromwell demanda également que la tête soit recousue sur le corps pour que sa famille puisse lui rendre hommage.
Charles Ier fut inhumé en privé dans la nuit du 7 février 1649 dans le caveau Henri VIII de la chapelle Saint-Georges du château de Windsor. Son fils, le futur roi Charles II envisagea de lui construire un mausolée élaboré mais il ne fut jamais réalisé.
Dix jours après l'exécution de Charles Ier, des mémoires attribués au roi commencèrent à être vendus. Ce livre, le Eikon Basilike (grec pour « Portrait Royal ») comprenait une apologia (« excuses ») pour les politiques royales et se révéla être un moyen de propagande efficace pour la cause royaliste. William Levett, le garçon de chambre de Charles Ier qui l'accompagna le jour de son exécution, jura qu'il avait personnellement vu le roi rédiger l'Eikon Basilike mais les historiens débattent de la véracité de cette affirmation154. John Cook publia le discours qu'il avait prévu dans le cas où Charles Ier aurait plaidé tandis que le Parlement chargea John Milton d'écrire une réponse l'Eikonoklastes (grec pour « Iconoclaste ») ; cette dernière rencontra néanmoins un succès inférieur à celui du livre royaliste.



