top of page

Athelstan

Æthelstan ou Athelstan (vers 894 – 27 octobre 939) est roi des Anglo-Saxons, puis des Anglais, de 924 à sa mort. Il est considéré comme le premier roi d'Angleterre et l'un des plus grands monarques de la période anglo-saxonne de l'histoire du pays.

 

Fils d'Édouard l'Ancien, Æthelstan est d'abord reconnu roi par les Merciens, et rencontre une certaine résistance dans le Wessex, qui a peut-être élu roi son demi-frère Ælfweard pour succéder à Édouard. Ælfweard ne survit que quelques semaines à leur père, mais Æthelstan n'est sacré roi qu'en septembre 925. Il conquiert le royaume viking d'York en 927 et devient le premier roi anglo-saxon dont l'autorité s'étend à toute l'Angleterre. En 934, il envahit le royaume d'Écosse et contraint le roi Constantin II à reconnaître son autorité. Écossais et Vikings s'allient contre Æthelstan et envahissent l'Angleterre en 937, mais il remporte une victoire retentissante sur leur coalition à Brunanburh.

Sous le règne d'Æthelstan, le gouvernement du royaume devient plus centralisé : il exerce un contrôle accru sur la production de chartes et convoque fréquemment à ses conseils des personnalités importantes venues de régions périphériques. Des rois étrangers, notamment gallois, assistent également à ces conseils, témoignage de leur soumission à Æthelstan. Son activité diplomatique s'étend à toute l'Europe, notamment à travers le mariage de ses sœurs à plusieurs souverains du continent. Il subsiste une grande quantité de textes de lois de son règne : ses réformes législatives s'appuient sur celles de son grand-père Alfred le Grand et témoignent de sa préoccupation quant aux atteintes à la loi et aux menaces qu'elles font peser sur l'ordre social. Æthelstan est également un roi dévot, un collectionneur de reliques et fondateur d'églises réputé. Sa cour devient l'un des principaux centres du savoir du pays, annonçant la réforme bénédictine de la fin du siècle.

 

Jamais marié, Æthelstan ne laisse pas d'héritier pour lui succéder. C'est son demi-frère cadet Edmond qui monte sur le trône à sa mort, en 939. Les Vikings profitent de la situation pour reprendre York, qui n'est définitivement reconquise par les Anglais qu'en 954.

Au début du IXe siècle, l'Angleterre anglo-saxonne est partagée entre quatre grands royaumes : le Wessex, la Mercie, la Northumbrie et l'Est-Anglie1. Le Wessex prend l'ascendant sur la Mercie sous le règne d'Ecgberht (802-839), l'arrière-arrière-grand-père d'Æthelstan, et devient le royaume le plus puissant du Sud de l'Angleterre. Les raids vikings commencent à frapper la Grande-Bretagne de plus en plus durement au milieu du IXe siècle. L'invasion de la Grande Armée païenne débute en 865 et détruit en l'espace de quinze ans l'Est-Anglie, la Northumbrie et la Mercie. Seul le Wessex résiste victorieusement à son avancée, et le roi Alfred le Grand remporte une victoire décisive sur les envahisseurs à Ethandun en 878. Alfred et le chef viking Guthrum se partagent la Mercie. Les offensives danoises reprennent dans les années 890, mais elles sont repoussées par les armées anglo-saxonnes, menées par Alfred, son fils Édouard et son gendre Æthelred, qui gouverne la partie anglaise de la Mercie avec son épouse Æthelflæd, la fille d'Alfred. À la mort d'Alfred en 899, Édouard lui succède. Son cousin germain Æthelwold tente de s'emparer du trône, mais il est tué au combat en 902.

 

La guerre entre les Anglo-Saxons et les Vikings se poursuit sous le règne d'Édouard. En 910, les Danois de Northumbrie attaquent la Mercie, mais ils subissent une défaite cinglante à Tettenhall4. Après la mort d'Æthelred de Mercie en 911, sa veuve Æthelflæd gouverne seule la région. Édouard et Æthelflæd parviennent à reconquérir la Mercie danoise et l'Est-Anglie dans les années qui suivent. En 918, Édouard profite de la mort de sa sœur pour déposer sa nièce Ælfwynn et annexer la Mercie à son royaume5. À la mort d'Édouard, en 924, toute l'Angleterre au sud du Humber est soumise au Wessex. Le royaume d'York est gouverné par un Viking, Sihtric, mais un certain Ealdred maintient un domaine anglo-saxon autour de Bamburgh, en Bernicie. Le roi Constantin II règne sur l'Écosse, à l'exception du royaume de Strathclyde au sud-ouest. Enfin, le pays de Galles est fragmenté en plusieurs petits royaumes, dont le Deheubarth au sud-ouest, le Gwent au sud-est, le Brycheiniog au nord du Gwent, et le Gwynedd au nord.

D'après Guillaume de Malmesbury, Æthelstan monte sur le trône à l'âge de trente ans, ce qui le ferait naître vers 894. Il est le fils aîné d'Édouard l'Ancien, et le seul issu de sa relation avec Ecgwynn, une femme très mal connue dont le nom ne figure que dans des sources postérieures à la conquête normande. Ces mêmes sources ne s'accordent pas sur son rang : elle est de noble naissance pour certaines, mais Hrotsvita de Gandersheim la décrit comme de basse extraction et indigne d'être reine18. Son statut reste débattu. Simon Keynes et Richard Abels estiment qu'Ecgwynn n'était que la concubine d'Édouard, ce qui expliquerait pourquoi l'arrivée au pouvoir d'Æthelstan suscite des contestations dans le Wessex. En revanche, Barbara Yorke et Sarah Foot considèrent que c'est la querelle de succession qui a donné naissance aux accusations d'illégitimité, et non le contraire : d'après elles, Ecgwynn est bien l'épouse légitime d'Édouard.

 

Guillaume de Malmesbury décrit une cérémonie durant laquelle Alfred le Grand offre à son petit-fils un manteau écarlate, une ceinture sertie de joyaux et une épée au fourreau doré23. Pour Michael Lapidge et Michael Wood, cette cérémonie représente la désignation d'Æthelstan comme héritier possible du trône, d'autant qu'elle prend place à une période où les droits sur le trône d'Æthelwold, le neveu d'Alfred, menacent sa propre lignée24,25. Janet Nelson rappelle que les années 890 sont marquées par des relations difficiles entre Alfred et Édouard, et propose l'hypothèse qu'Alfred ait pu vouloir diviser le royaume entre son fils et son petit-fils à sa mort26.

Il existe un poème acrostiche en l'honneur d'un prince « Adalstan », qui lui prédit un grand avenir. Lapidge y voit une référence au jeune Æthelstan, avec un calembour sur « pierre noble », le sens de son nom en vieil anglais. Lapidge et Wood l'attribuent à Jean le Saxon, l'un des principaux érudits de la cour d'Alfred, qui l'aurait écrit à l'occasion de la cérémonie des cadeaux. Wood va plus loin en présentant le poème comme une preuve de la véracité du récit de Guillaume de Malmesbury, et en suggérant qu'Æthelstan ait pu recevoir une éducation approfondie sous l'autorité de Jean le Saxon. Néanmoins, Sarah Foot préfère dater le poème des premières années du règne d'Æthelstan.

Édouard se marie avec Ælfflæd vers 899, année de la mort de son père. Ce mariage est sans doute dû à la mort d'Ecgwynn, à moins qu'elle n'ait été répudiée. Il affaiblit la position d'Æthelstan, car sa belle-mère agit évidemment dans l'intérêt des fils qu'elle donne à Édouard, Ælfweard et Edwin. Le roi contracte un troisième mariage avant 920 avec Eadgifu, probablement après avoir répudié Ælfflæd. Eadgifu donne à son tour deux fils à Édouard, Edmond et Eadred. De ses trois mariages, Édouard a également plusieurs filles, dont le nombre s'élève peut-être jusqu'à neuf.

 

L'éducation d'Æthelstan se termine probablement à la cour de Mercie, auprès de sa tante Æthelflæd et de son oncle Æthelred. Il participe vraisemblablement aux campagnes militaires contre le Danelaw dans les années 910. D'après une charte qui n'est connue que par une copie du début du XIVe siècle, Æthelstan aurait accordé en 925 des privilèges au prieuré Saint-Oswald de Gloucester, où reposent Æthelred et Æthelflæd, « en vertu d'un pacte de piété paternelle solennellement conclu avec Æthelred, ealdorman du peuple des Merciens ». Il est possible qu'il ait représenté les intérêts de son père en Mercie après la mort d'Æthelflæd et l'annexion de ce royaume au Wessex.

Édouard l'Ancien meurt à Farndon, dans le nord de la Mercie, le 17 juillet 924. Sa mort marque le début d'une série d'événements qu'il est difficile de retracer. Il est possible que le roi défunt ait voulu que lui succède Ælfweard, l'aîné des fils de sa deuxième femme Ælfflæd, voire de procéder à un partage du royaume entre le Wessex (pour Ælfweard) et la Mercie (pour Æthelstan). Dans cette hypothèse, la déposition d'Ælfwynn en 918 aurait servi à préparer l'avènement d'Æthelstan à la tête de la Mercie. Au moment de la mort d'Édouard, Ælfweard se trouve au Wessex, tandis qu'Æthelstan se trouve apparemment auprès de son père. Il est aussitôt reconnu roi par les Merciens, mais il est possible que les barons du Wessex aient préféré élire son demi-frère. Quoi qu'il en soit, Ælfweard meurt le 2 août, n'ayant survécu à leur père que seize jours.

La mort d'Ælfweard ne semble pas avoir éteint l'opposition à Æthelstan qui règne au Wessex et tout particulièrement à Winchester, où le prince défunt est inhumé. Æthelstan se comporte dans les premiers mois de son règne comme un roi purement mercien : une charte de 925 concernant des terres dans le Derbyshire a pour seuls témoins des évêques de Mercie. David Dumville et Janet Nelson proposent d'interpréter son célibat comme une concession lui ayant permis d'être accepté comme roi, mais Sarah Foot y voit plutôt un choix d'ordre religieux.

 

La cérémonie du couronnement d'Æthelstan se déroule le 4 septembre 925 à Kingston upon Thames, ville peut-être choisie en raison de sa situation à la frontière entre la Mercie et le Wessex. Le roi est sacré par Athelm, l'archevêque de Cantorbéry, qui rédige ou applique probablement à cette occasion un nouvel ordo. Inspiré de la liturgie franque, cet ordo voit le roi porter une couronne pour la première fois au lieu d'un casque. Il inspire à son tour par la suite l'ordo de la France médiévale.

Le sacre d'Æthelstan ne met pas un terme à la résistance au nouveau souverain. Guillaume de Malmesbury parle d'un noble nommé Alfred qui cherche à punir le roi de sa bâtardise supposée en lui crevant les yeux. Ce handicap aurait suffi pour rendre Æthelstan incapable d'exercer le pouvoir, et Alfred n'aurait pas encouru l'opprobre réservée aux assassins. Ce personnage ne figure dans aucune autre source, et Guillaume ne précise pas s'il cherche à s'emparer lui-même du trône ou s'il compte l'offrir à Edwin, le frère cadet d'Ælfweard. Les relations entre Æthelstan et la ville de Winchester semblent être restées tendues pendant plusieurs années. Frithestan, l'évêque de Winchester, n'assiste pas au sacre du roi, et il n'apparaît sur ses chartes qu'en 928, dans une position inférieure à celle que son ancienneté devrait lui assurer.

Edwin meurt en 933 lors d'un naufrage dans la mer du Nord. Son cousin, le comte Adalolphe de Boulogne, le fait inhumer en l'abbaye Saint-Bertin de Saint-Omer. Croyant à tort qu'il avait régné sur l'Angleterre, l'annaliste de l'abbaye, Folcuin, écrit qu'il a fui l'île « chassé par des troubles dans son royaume ». Le chroniqueur du XIIe siècle Siméon de Durham accuse Æthelstan d'avoir fait noyer son demi-frère, mais la plupart des historiens n'apportent aucun crédit à cette affirmation. Il est possible qu'Edwin ait quitté l'Angleterre à la suite d'une révolte manquée contre Æthelstan. Quoi qu'il en soit, sa mort contribue certainement à l'apaisement des tensions entre le roi et Winchester.

 

Æthelstan envahit l'Écosse en 934 pour des raisons incertaines. Il est possible qu'il ait enfin eu les mains libres après la mort de son demi-frère Edwin l'année précédente. La mort du roi de Dublin Gothfrith en 934 a pu fragiliser la situation danoise et offrir à Æthelstan une opportunité d'imposer sa domination dans le Nord. Les Annales de Clonmacnoise proposent une autre hypothèse : elles mentionnent en 934 le décès d'un souverain qui pourrait être Ealdred de Bamburgh, dont les terres auraient alors été disputées entre Constantin et Æthelstan. Le chroniqueur du XIIe siècle Jean de Worcester affirme que Constantin avait rompu le traité passé avec Æthelstan.

La campagne débute en mai 934. Æthelstan est accompagné de quatre rois gallois : Hywel Dda de Deheubarth, Idwal Foel de Gwynedd, Morgan ap Owain de Gwent et Tewdwr ap Griffri de Brycheiniog. Sa suite comprend également dix-huit évêques et treize comtes, dont six Danois. Il arrive à Chester-le-Street fin juin ou début juillet et offre des cadeaux somptueux au sanctuaire de saint Cuthbert. D'après Siméon de Durham, les armées d'Æthelstan s'enfoncent jusqu'à Dunnottar, dans le nord-est de l'Écosse, tandis que sa flotte ravage la région de Caithness, qui relève alors probablement du royaume viking des Orcades.

Les chroniques ne mentionnent aucun affrontement et ne précisent pas l'issue de la campagne. On sait seulement qu'Æthelstan est de retour à Buckingham en septembre avec Constantin, qui témoigne sur une charte en tant que subregulus, autrement dit comme roi vassal d'Æthelstan. Il apparaît également sur une charte de 935 aux côtés d'Owain de Strathclyde, Hwel Dda, Idwal Foel et Morgan ap Owain. Les rois gallois reviennent à la cour d'Æthelstan à Noël la même année, mais Constantin ne y les accompagne plus.

 

La cour du Wessex entretient des relations avec les Carolingiens au moins depuis le mariage d'Æthelwulf de Wessex, l'arrière-grand-père d'Æthelstan, avec Judith de Flandres, la fille de Charles le Chauve. L'une des demi-sœurs d'Æthelstan, Eadgifu, s'est mariée avec le roi de Francie occidentale Charles le Simple vers la fin des années 910. Après la déposition de Charles, en 922, Eadgifu envoie leur fils Louis en sécurité de l'autre côté de la Manche. Les liens franco-saxons sont donc solidement établis à l'époque d'Æthelstan. C'est probablement pour dresser un parallèle entre son pouvoir et celui des Carolingiens qu'il se fait oindre lors de son sacre. Suivant le modèle carolingien, il apparaît coiffé d'une couronne sur la série monétaire émise entre 933 et 938, pour la première fois en Angleterre.

 

Comme son père, Æthelstan ne souhaite pas voir les femmes de sa famille épouser ses propres sujets. Ses sœurs embrassent donc une carrière monastique ou sont envoyées se marier avec des nobles à l'étranger. L'intense activité diplomatique d'Æthelstan est également liée à la menace des Vikings, qui pèse sur l'ensemble des royaumes d'Europe de l'Ouest. Du point de vue de ces derniers, la puissance et la réputation de la maison de Wessex sont suffisamment importantes pour qu'épouser une de ses princesses soit considéré comme une union prestigieuse. Un exemple permet d'illustrer le prestige du Wessex à cette époque : en 926, le duc des Francs Hugues le Grand envoie une ambassade à la cour d'Æthelstan pour demander la main d'une de ses sœurs. Cette ambassade, menée par le comte de Boulogne Adalolphe (un cousin du roi anglais), offre à Æthelstan de nombreux cadeaux: épices, bijoux, chevaux, mais aussi une couronne d'or massif, l'épée de Constantin le Grand, la lance de Charlemagne et un fragment de la Sainte Couronne. L'ambassade est une réussite : Hugues obtient la main d'Eadhild, une des demi-sœurs d'Æthelstan.

C'est avec les Ludolphides de Francie orientale qu'Æthelstan conclut son alliance la plus importante. La dynastie vient alors d'arriver au pouvoir après l'extinction de la branche carolingienne issue de Louis le Germanique, et Henri l'Oiseleur est alors considéré par beaucoup comme un parvenu. Il doit conclure une union prestigieuse pour son fils afin d'établir sa légitimité, mais aucune princesse carolingienne n'est disponible. La maison de Wessex constitue une alternative acceptable, d'autant plus qu'elle affirme (à tort) descendre d'Oswald de Northumbrie, un saint dont le culte est particulièrement répandu en Germanie. En 929 ou 930, Henri envoie une ambassade à Æthelstan pour lui demander la main d'une de ses sœurs pour son fils Othon. Le roi lui en envoie deux, et Othon choisit Eadgyth. L'autre, dont le nom est incertain, se marie avec un prince non identifié de la région des Alpes.

 

Æthelstan joue le rôle de père adoptif pour plusieurs princes dépossédés. En 936, il envoie une flotte aider son protégé Alain II à reconquérir son duché de Bretagne conquis par les Vikings. La même année, il apporte son soutien à son neveu Louis pour le trône de Francie occidentale, et en 939, il envoie une autre flotte à son secours contre des barons révoltés. Des sources scandinaves plus tardives affirment qu'il aurait également aidé Håkon le Bon, fils du roi Harald à la Belle chevelure, à s'emparer du trône de Norvège. Il est surnommé « Æthelstan le Bon » dans ce pays.

Toutes ces raisons font de la cour d'Æthelstan l'une des plus cosmopolites de l'Angleterre anglo-saxonne. Les relations étroites tissées avec le continent connaissent leur terme peu après sa mort, mais pour les familles nobles d'Europe, compter un ancêtre anglais dans sa généalogie reste longtemps une source de prestige. Pour l'historien Frank Stenton, « aucun roi anglais n'a joué un rôle aussi majeur et constant dans les affaires européennes entre Offa et Knut ».

 

Æthelstan meurt le 27 octobre 939 à Gloucester. Contrairement à son grand-père et à son père, il choisit de ne pas se faire enterrer à Winchester. Suivant ses dernières volontés, il est inhumé en l'abbaye de Malmesbury, où il rejoint ses deux cousins tués à Brunanburh. Ce sont les seuls membres de la maison de Wessex enterrés à Malmesbury, ce qui reflète selon Guillaume de Malmesbury la dévotion toute particulière d'Æthelstan à l'égard de ce monastère et de son abbé Aldhelm de Sherborne. Ses restes disparaissent lors de la Réforme, et sa tombe à l'abbaye, façonnée au XVe siècle, est donc vide.

Après la mort d'Æthelstan, les habitants d'York font appel au roi de Dublin Olaf Gothfrithson, le vaincu de Brunanburh, réduisant à néant l'hégémonie anglo-saxonne dans le Nord qui semblait si solide après cette bataille. Les successeurs d'Æthelstan, ses demi-frères Edmond (939-946) et Eadred (946-955), consacrent la majeure partie de leurs règnes à reconquérir la Northumbrie. Ce n'est qu'en 954 que l'Angleterre est réunifiée, lorsque le dernier roi viking d'York, Éric à la Hache de sang, est chassé par ses sujets qui reconnaissent Eadred comme roi.

Longtemps éclipsé par son grand-père Alfred le Grand, Æthelstan est aujourd'hui considéré par les historiens comme l'un des plus grands représentants de la maison de Wessex. Frank Stenton et Simon Keynes le considèrent tous deux comme digne de comparaison avec Alfred. Pour David Dumville, il est « le père de l'Angleterre médiévale et moderne », tandis que Michael Wood le range avec Offa et Alfred parmi les plus grands souverains de l'époque anglo-saxonne166. Il considère également Æthelstan comme « l'un des intellectuels laïcs les plus importants de l'histoire anglo-saxonne ».

 

Les historiens modernes considèrent souvent Æthelstan comme le premier roi d'Angleterre168. Même si York n'a été définitivement conquise que par son neveu Eadred, ce sont les campagnes d'Æthelstan qui ont rendu l'unification de l'Angleterre possible. Pour Simon Keynes, la manière dont son neveu Edgar assume le titre de « roi des Anglais » et s'efforce de dominer tous les peuples de Grande-Bretagne est une réitération de la politique d'Æthelstan. Néanmoins, pour d'autres historiens, l'œuvre d'Æthelstan est éphémère : Charles Insley considère que son hégémonie n'a pas d'équivalent avant le règne d'Édouard Ier, trois siècles et demi plus tard. D'après George Molyneaux, faire d'Æthelstan le premier roi d'Angleterre conduit à une association erronée entre ce roi et le territoire anglais, alors que de son vivant, c'est l'intégralité de la Grande-Bretagne qui est considérée comme son domaine.

Le règne d'Æthelstan voit la naissance d'un État centralisé tel que l'Angleterre n'en avait encore jamais connu, dans lequel le roi et son conseil œuvrent pour assurer le respect de l'autorité et des lois royales. C'est sur ces fondations que les frères et les neveux d'Æthelstan bâtissent, tout au long du Xe siècle, l'un des systèmes de gouvernement les plus prospères et les plus développés d'Europe. Le renforcement du renouveau ecclésiastique au niveau local pose également les bases du mouvement réformateur qui marque la seconde moitié du siècle.

 

La réputation d'Æthelstan est à son zénith à sa mort, non seulement en tant que chef militaire et monarque compétent, mais aussi pour sa dévotion. Le chroniqueur Æthelweard n'a que des louanges à lui adresser, et son lointain successeur Æthelred le Malavisé appelle son fils aîné Æthelstan. Il tombe ensuite dans l'oubli jusqu'au XIIe siècle, lorsque Guillaume de Malmesbury s'intéresse au seul roi ayant choisi d'être enterré dans son monastère. La chronique de Guillaume entretient le souvenir d'Æthelstan et donne lieu à des louanges chez d'autres chroniqueurs ultérieurs. Au début du XVIe siècle, William Tyndale se justifie d'avoir traduit la Bible en anglais en rappelant que le roi Æthelstan avait fait traduire les textes sacrés en anglo-saxon.

 

C'est à partir du XVIe siècle qu'Æthelstan, éclipsé par Alfred, disparaît de la conscience populaire. Dans son History of the Anglo-Saxons, publié entre 1799 et 1805, Sharon Turner est l'un des premiers à mettre en évidence le rôle crucial de la bataille de Brunanburh dans l'histoire anglaise, mais son traitement du règne d'Æthelstan est beaucoup plus sommaire que celui d'Alfred. Charles Dickens ne lui consacre qu'un paragraphe dans sa Child's History of England, et bien que la période anglo-saxonne soit un sujet populaire chez les peintres du XIXe siècle, il n'existe pas une seule toile représentant Æthelstan dans les collections de la Royal Academy pour la période 1769-1904. D'après Ann Williams, cet oubli est dû à la pauvreté des sources le concernant : contrairement à son grand-père, Æthelstan n'a pas eu de biographe attitré, et la Chronique anglo-saxonne est très laconique pour son règne. Michael Wood le considère comme « le grand oublié » des monarques anglais.

© 2023 by Going Places. Proudly created with Wix.com

  • White Facebook Icon
bottom of page